22.03 -
Traduction du texte de Filipa Ramos sur l'exposition de Marine Hugonnier
18 ans ont passé depuis les observations critiques de Hal Foster sur la position de l'artiste comme ethnographe. Ce texte, avec la Documenta X de Catherine David en 1997 et sa remise en cause des fondements anthropologiques de la culture occidentale, sont devenus deux événements révolutionnaires, qui annonçaient un resserrement des enquêtes artistiques et anthropologiques qui ont émergé à ce jour.
Si les années 2000 ont connu une période de ralentissement relatif de l'intérêt pour les méthodes, les thèmes et les scénarios d'observations ethnographiques et d'analyses comparatives anthropologiques, nous vivons actuellement une autre renaissance ethnographique des pratiques artistiques, qui -
Exhibition March 22 -
Marine Hugonnier est une artiste installée à Londres qui a entrepris de longue date une exploration à la croisée des chemins entre l'anthropologie et la philosophie. Son exposition personnelle L'Abeille, le Perroquet, le Jaguar à la galerie Fortes Vilaça présente un moment important de son étude, qui s'inspire des écrits de l'anthropologue brésilien Eduardo Viveiros de Castro, un personnage clé pour les voies actuelles du réalisme philosophique et de l'évaluation critique des dualismes culture / nature de la modernité.
Toutes sortes de formes de vie potentielles créées par Marine Hugonnier habitent l'exposition: des objets, des images et des situations pour lesquels les lignes entre symbolisme, représentation et réalisation ont été volontairement brouillées par l'artiste. Occupant la grande salle souterraine de la galerie, l'espace devient une sorte d'écrin pour la mise en scène de ces êtres multiples. La première rencontre a lieu à l'entrée, où une figure rouge solitaire, Anima(L) (2014), qui ressemble vaguement à une pyramide creuse ou une crête de montagne stylisée, fait face au visiteur. C'est la plus grande d'une série de quatre groupes de relativement petites sculptures en acier à revêtement d'aluminium toutes intitulées Anima (2014), qui sont disposées en fonction de leur couleur (rouge, vert jaune et bleu) et de leurs propriétés formelles. Certaines sont présentées aux côtés d'autres éléments, comme c'est le cas de l’Anima rouge, qui est accompagnée d'une grande photographie de panthère noire.
Chaque ensemble Anima est installé sur un support de taille différente, dont la surface supérieure est un miroir qui absorbe et projette l'environnement, en intégrant le visiteur dans son image inversée. Outre l'appel émis par ces surfaces réfléchissantes, il y a quelque chose de profondément attractif dans ces ensembles de figures géométriques abstraites, qui sont en quelque sorte des adaptations décoratives de formes constructivistes russes tropicales et ludiques. Leur taille et leur facilité d'accès invitent le visiteur à les manipuler et les déplacer dans un jeu hypnotique entre tenir, jouer, voir et être vu.
Vers la gauche, l'Anima vert -
Sur le cinquième socle est déposé un livre intitulé Forest (2014). Il se compose d'un assemblage multiple de coupures de magazines avec des scènes de jungle qui sont coupés sur la longueur en trois sections permettant aux différentes images de se mélanger avec les précédentes et suivantes pour former de multiples combinaisons d'images: les animaux évoluent dans des plantes, le ciel cède la place à des feuilles, et la cime des arbres devient une fourrure de léopard dans un belle échange de manières d'être.
Diverses formes de contact et d'interactions possibles entre les choses sont aussi au cœur de l'œuvre phare de l'exposition, le film en 16mm de 26 minutes Apicula Enigma [L'énigme de l'abeille] (2013). Tourné dans les Alpes françaises, il introduit une dérivation spatiale des références géographiques prépondérantes latino-
Il semble curieux que la distance – autant que la résistance (au temps, à la traduction et à l'interprétation) reste une question fondamentale dans le débat autour de la critique de la naturalisation de l'abîme entre la nature et la culture. La distance était le thème central du texte de Foster en 1996, qui mettait en doute la capacité réelle de l'artiste à atteindre l'Autre recherché, dont la présence était située bien au-
© ArtCatalyse International / Marika Prévosto 2014.Tous droits réservés